L’alternance est-elle la solution pour l’insertion des jeunes sur le marché de l’emploi ?


A l’occasion des rencontres villeurbannaises de l’apprentissage et de l’alternance du 13 septembre 2023 organisées par la Mission Locale de Villeurbanne, nous avons donné la parole à des jeunes, des entreprises, des écoles ainsi qu’à la sous-préfète du Rhône Salwa PHILIBERT.

 

L’emploi difficile d’accès pour les jeunes

 

Les jeunes et différentes antennes de la Mission Locale, s’inquiètent quant à leur situation face à l’emploi. Rappelons que le taux de chômage des 15-24 ans en 2022 en France selon l’Insee était de 17,4 % contre 7,3 % pour l’ensemble de la population active (L'essentiel sur... le chômage  | Insee). Entre le complexe contexte économique et la situation de l’emploi déjà compliquée pour la population active, les jeunes sont alors les premiers·ères touché·es. Comme l’explique Stéphanie Gallois, travaillant à la Mission Locale de Villeurbanne, « l’alternance favorise l’insertion des jeunes par une formation théorique et pratique chez l’employeur. C’est donc un déclencheur d’insertion professionnelle. » Des jeunes nous ont aussi confié leurs espoirs et attentes dont Ramata, 19 ans : « L’alternance permet d’avoir plus de responsabilités et c’est ce que j’aimerais avoir. » D’autres dépeignent leurs inquiétudes comme Nadjib : « J’ai un Bac+3 et j’aurais aimé faire une alternance en gestion de patrimoine et toutes les propositions sont de Bac à Bac+2 donc je ne me vois pas refaire un Bac+2 ».

 

L’alternance : solution idéale ?

 

Il n’est en réalité pas systématique que les entreprises embauchent les alternant·es à l’issue de leur contrat d’apprentissage. Un tiers d’entre eux ne sont pas en emploi six mois après la fin de leur contrat d’alternance, en 2023, selon les chiffres du gouvernement (Les chiffres de l’apprentissage en 2022 | Le Portail de l'Alternance (emploi.gouv.fr)). Concernant la pérennité des jeunes au sein d’une firme, la chargée de recrutement de l’entreprise Iserba, dans le domaine de la maintenance immobilière, a rassuré : « L’objectif principal est de recruter les alternants sur le long terme. On prend en compte les besoins et la personnalité des jeunes dans notre entreprise. » Valérie Jeannot, chargée de recrutement chez Dalkia dans la région centre-est, ajoute : « On promeut ces jeunes par des interviews filmées postées sur les réseaux sociaux pour essayer de créer des vocations futures. » Il semblerait que la longévité des jeunes dans une entreprise après l’alternance dépende de la volonté de l’entreprise. Les écoles tentent d’accompagner dans ce chemin comme Afpa, proposant une formation dans les domaines du bâtiment et des services publics : « La grosse difficulté dans le développement de l’alternance c’est ces terrains d’accueil, donc les entreprises qui ont la capacité de mettre à disposition une personne pour suivre l’alternant et respecter le contrat tripartite, entre l’alternant, l’entreprise et l’école ». Formation et Santé précise à propos des jeunes : « on leur demande juste d’être investis et sérieux »

 

Qu’en disent les pouvoirs publics ?

 

Nous avons partagé les attentes et remarques des différents acteurs du milieu et surtout des jeunes à Mme Salwa PHILIBERT, sous-préfète du Rhône chargée de la politique de la ville. Consciente de certaines dérives, elle explique : « L’alternance, c’est le choix du roi. L’entreprise choisit les jeunes qu’elle souhaite former. On a des employeurs vertueux et d’autres un peu moins, qui vont utiliser l’alternance comme un levier dans les « contrats aidés ». On les engageait pour avoir une main d’œuvre moins chère et à l’issue du contrat on les remerciait ». Salwa Philibert soulève une contradiction de la fonction publique en apportant un élément de solution quant à la pérennité des jeunes en entreprise : « Là où je peux me fâcher c’est que nous, fonction publique, on n’est pas exemplaire. Dans le Rhône, on a signé 37 000 contrats d’apprentissage sur 2022 mais moins de 800 dans la fonction publique. On n’est en difficulté, on n’arrive pas à recruter et on est tous en concurrence les uns envers les autres. » Alors que « l’apprentissage, si c’est bien fait, avec un tuteur, bien encadré avec un vrai respect du jeune ou du moins jeune, je pense qu’on peut sans soucis monter à 90 % d’employabilité derrière ». Les personnes des diverses Missions Locales présentes à cet événement ont partagé leurs inquiétudes quant à la création de France Travail qui remplace au 1er janvier 2024 Pôle Emploi en englobant les Missions Locales au réseau. Celles-ci craignent de perdre en marge de manœuvre auprès des jeunes, ayant un statut associatif. Salwa Philibert tente de rassurer les structures en indiquant ses priorités d’action : « Sur les publics jeunes, c’est l’accompagnement notamment sur le logement et la mobilité. La place de la Mission Locale ne se dispute même pas là-dessus ».

Articile de Clémence Fourel